In Memoriam #10, Cinema #35
Charlton Heston
(1924-2008)
Charlton Heston est un axiome. Il constitue à lui seul une tragedie, et sa présence dans un film, quel qu'il soit, suffit à provoquer la beauté. La violence contenue dont témoignent la sombre phosphorescence des yeux, le profil d'aigle, l'arc orgueilleux des sourcils, le saillant des pommettes, la courbe amère et dure de la bouche, la fabuleuse puissance du torse, voilà ce qui est donné, et que le pire metteur en scène ne peut avilir. C'est dans ce sens que l'on peut dire que Charlton Heston, par son existence seule en dehors de tout film donne du cinéma une définition plus que des films comme Hiroshima [Mon Amour] ou Citizen Kane dont l'esthétique ignore ou récuse Charlton Heston. Par lui, la mise en scène peut accéder aux affrontements les plus intenses et les résoudre par le mépris d'un dieu prisonnier, secoué de grondements sourds.
Michel Mourlet, “Apologie de la violence” Cahiers du cinéma (May 1960)